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Faust sous un nouvel angle Zurich Opernhaus 11/12/2006 - et le 19 novembre 2006
Ferruccio Busoni: Doktor Faust
Sandra Trattnigg (Herzogin von Parma), Thomas Hampson (Dr. Faust),
Gregory Kunde (Mephistopheles), Tomasz Slawinski (Wagner/
Zeremonienmeister), Reinaldo Macias (Herzog von Parma/ Soldat), Andreas
Winkler (Tenor 1/ Krakau 1/Wittenberg 1), Randall Ball (Tenor 2/
Belzebub/Wittenberg 2), Martin Zysset (Tenor 3/ Leutnant/Wittenberg 4),
Miroslav Christoff (Tenor 4/ Megaros/ Wittenberg 5), Gabriel Bermudez
(Bariton 1/ Asmodus/ Naturgelehrter), Mathew Leigh (Bariton 2/ Krakau
2/ Wittenberg 3), Thilo Dahlmann (Bass 1/ Krakau 3), Giuseppe Scorsin
(Bass 2/ Theologe/ Gravis), Tomasz Slawinski (Bass 3/ Jurist/ Levis)
Orchestre de l’Opernhaus de Zurich, Chœur de l’Opernhaus (préparation: Jürg Hämmerli), direction musicale: Philippe Jordan
Mise en scène: Klaus Michael Grüber, assistante à la mise en scène:
Ellen Hammer, décors: Eduardo Arroyo, costumes: Eva Dessecker,
lumières: Jürgen Hoffmann
Toute représentation du Doktor Faust
de Busoni à l’Opernhaus revêt un caractère particulier, étant donné que
le compositeur a vécu à Zurich de 1915 à 1920, où il a écrit une grande
partie de son chef-d’œuvre lyrique. La version proposée est celle de
Philipp Jarnach, élève et collaborateur de Busoni. Le livret, écrit par
le musicien lui-même, diffère énormément du Faust de Goethe,
Busoni ayant renoncé à se mesurer au grand écrivain, préférant puiser
aux sources allemandes du XVIe et du XVIIe siècle, et notamment aux
spectacles de marionnettes dont le docteur est le héros. La soirée
éclaire donc d’autres aspects d’un des plus grands mythes de la culture
occidentale.
La production zurichoise vaut essentiellement pour les deux interprètes
principaux qu’elle réunit, qui frôlent l’idéal. Après son succès au
Festival de Salzbourg en 1999 (dans la version d'Antony Beaumont cette
fois), Thomas Hampson retrouve le personnage de Faust. Si la tessiture
du rôle-titre peut parfois sembler un peu basse pour lui, force est
néanmoins de reconnaître que le chanteur offre une incarnation
exceptionnelle, grâce à son charisme, à son indéniable présence
scénique et à sa silhouette lui permettant de s’identifier sans peine à
un intellectuel, un être rongé par le doute. Son expérience du Lied
l’aide à saisir et à restituer avec justesse chaque mot et chaque
phrase. Constamment sur scène, aux prises avec un rôle meurtrier, il
porte littéralement le spectacle, lui conférant une profondeur inouïe
dans le grand monologue final, proprement époustouflant. Dans la
partition de Busoni, Mephisto est un rôle de ténor. Et Gregory Kunde
évolue à la même hauteur artistique que Thomas Hampson. Il triomphe
sans peine d’une tessiture cantonnée dans les extrêmes, et n’a pas
besoin de se forcer pour paraître diabolique.
Dans la fosse, Philippe Jordan parvient à donner une unité à une œuvre
d’une surprenante variété stylistique, qui mêle différentes influences,
ainsi qu’une certaine tension dramatique à un ouvrage très cérébral et
statique, dans lequel la théatralité et l’ironie font défaut. Regarder
le chef couver du regard musiciens et solistes, leur donner quasiment
tous les départs, s’engager à fond dans la partition pour en offrir une
lecture extrêmement nuancée et différenciée, est un spectacle à lui
tout seul. Dommage simplement que les chanteurs soient parfois couverts
par la masse orchestrale.
La partie scénique du spectacle laisse le public sur sa faim, tant on
pouvait espérer beaucoup mieux d’un artiste aussi réputé que Klaus
Michael Grüber, qui se contente ici, si on peut dire, de raconter
l’histoire, telle quelle, de façon linéaire et narrative, et de gérer
l’entrée et la sortie des solistes, des choristes et des figurants. On
admire en revanche les décors d’Eduardo Arroyo (notamment le
laboratoire de Faust, immense pièce remplie d’étagères métalliques
pleines de flacons et de fioles contenant des liquides de toutes les
couleurs) et les costumes stylisés d’Eva Dessecker pour la scène du
bal, qui paraissent sortir tout droit d’un conte fantastique.
Claudio Poloni
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